L’enseignement supérieur agronomique public a un rôle de service public essentiel à garantir au sein du Ministère de l’Agriculture. Une mission de service public d’éducation supérieure tout d’abord, en proposant des formations de licences professionnelles, d’ingénieurs et de masters répondant aux besoins de compétences des secteurs professionnels de l’agriculture, de l’agro-alimentaire, de l’environnement ou encore du développement agricole et rural, tout en apportant un regard critique sur le rôle de l’agriculture dans la société et en étant tourné vers les transitions agro-écologiques, climatiques et sociétales aujourd’hui incontournables.
Une mission de service public de recherche indépendante des intérêts économiques, centrée sur les sujets de société et de transition écologique et climatique.
Enfin, une mission d’ingénierie et de développement visant à accompagner les pouvoirs publics, les acteurs professionnels et l’enseignement agricole (dispositif national d’appui – DNA) pour relever les enjeux sociaux, économiques et environnementaux en faveur d’une agriculture et une alimentation durables et des territoires vivants.
La réalité de ce que nous vivons aujourd’hui dans l’enseignement supérieur est loin de répondre à ce que l’on devrait raisonnablement pouvoir attendre d’un tel service public. Plus que le service rendu à la société, ce sont plutôt les indicateurs académiques qui servent à mesurer la performance de nos établissements (classement de Shangaï, publications scientifiques, rémunération des étudiants dans leur premier emploi). C’est donc davantage la concurrence qui règne entre établissements dans le recrutement des étudiants ou dans les activités de recherche alors que les enjeux de développement durable appellent à plus de coopération et d’exemplarité dans nos établissements.
Cette logique de l’excellence académique, comme dans les entreprises multinationales, induit de perpétuelles stratégies de fusion-absorption entre établissements pour atteindre une soit-disant visibilité internationale comme en atteste aujourd’hui le projet de rapprochement d’AgroParisTech, SupAgro Montpellier et Agrocampus Ouest.
Ces restructurations permanentes justifiées de façon dogmatique déstabilisent les communautés de travail et sont génératrices pour les personnels de mal-être au travail du fait d’une perte du sens et de reconnaissance dans le travail.
S’il faut reconnaître que les financements publics à l’enseignement supérieur et à la recherche agronomique ont été davantage épargnés que d’autres secteurs publics ces 10 dernières années, la généralisation de la logique de financement par projet accentue la mise en concurrence et accroît l’incertitude sur la pérennité des moyens et met sous pression les personnels. Sous couvert d’autonomie, les établissements doivent assurer une part croissante d’autofinancement de leurs activités et se tournent de plus en plus vers les financements privés des entreprises (mécénats, chaire d’entreprises) ou des fondations en tout genre, en faisant peu de cas des questions d’éthique.
Dans ce contexte, nos établissements du supérieur ont un recours important à l’emploi de contractuels (plus du tiers des emplois) pour conduire les missions permanentes de service public en imposant aux agents des conditions d’emploi précaire (6 ans d’emploi en CDD avant de pouvoir prétendre à un CDI) entretenu par la logique de projet. Les méthodes de management issues du monde de l’entreprise mettent la conduite des missions sous le diktat du contrôle de gestion et de la « sécurisation juridique ».
Dans ce contexte, SUD Rural Territoires se mobilise dans l’enseignement supérieur agronomique pour défendre :
- Le maintien des missions de services public d’enseignement supérieur accessibles à tous les étudiants
- L’autonomie et l’indépendance de la recherche centrée sur les enjeux sociétaux et de transition
- Le statut de fonctionnaire pour assurer toutes les missions de services publics
- Le maintien d’un DNA de qualité et de proximité pour accompagner l’enseignement agricole public
- Un management des collectifs de travail souple et participatif et non un management par la performance individuelle avec l’instauration d’un cadre rigide.